La Cité des Crânes
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- Eric
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La Cité des Crânes
Pour alimenter la pompe, donc, en "avant première" de mon 500 signes qui se rajoutera sur la chronique de Jérôme :
En septembre dernier je n'ai pas fait mes devoirs, et je n'ai pas lu le forcément très attendu et très polémique dernier roman de Thomas Day. Attendu, rentrée littéraire oblige, et polémique - forcément - eût égard au personnage de Thomas Day, à sa grande gueule et à son engagement tout particulier dans ce texte. L'événement s'est orchestré avec une pompe assez inhabituelle dans notre petit landernau de la SF, en partie parce que ce jeu sur l'autofiction déborde sur des thématiques qui sortent de notre petite chapelle, et aussi, ne nous voilons pas la face, parce que D(um)ay est un directeur de collection incontournable officiant dans une vénérable maison. On a beaucoup glosé, mais moi, je n'ai pas fait mes devoirs, ce qui m'a permis de partir à la découverte de La Cité des Crânes dans un climat sinon plus serein, en tout cas plus propice à se poser la seule question qui au fond importe : que reste-t-il de ce roman pour le lecteur lambda qui ignore que Thomas Day est l'avatar de plume d'un éditeur en vue et qui se contrefout de savoir si c'est, ou non, un jeu sur l'autofiction (parce que lui, le lecteur lambda, l'autofiction, la littérature blanche ou le surexistentialisme anal il s'en fout pourvu que le plaisir de la lecture soit au rendez-vous) ?
Hé bien il reste un sacré bon bouquin, bordel de dieu ! Envoûtant, moite, habité par la passion du voyage et hanté par une région du monde où l'on sent, non, on sait, une fois la dernière page lue, que son auteur a laissé une partie de lui pour en revenir changé. Irrémédiablement. Les références sont très présentes, effet voulu mais nullement dérangeant. Bien vite finalement on ne cherche plus à savoir qui de Day ou Daezzler se confie à nous et on se laisse guider vers le chœur vert de cette cathédrale d'émeraude aux dimensions d'un sous-continent. Le scepticisme face à la démarche de s'épancher tout autant dans l'écriture que dans des trous humides s'efface devant l'engagement du verbe. On sort de La Cité des Crânes retourné, des images, des sons, des sensations plein la tête. Que Thomas Day ait finalement écrit ce roman pour solder ses comptes avec son passé importe peu, que sa vague intrigue d'espionnage ne soit pas assez développée non plus, puisqu'elle ne sert que de moteur à la lecture. Ce qui compte enfin, c'est qu'au fil des pages on sente pousser cette jungle, qu'on la sue nous aussi, qu'on découvre ce monde si loin, tellement loin du nôtre. Tout le reste, la rebel attitude en carton pâte de son héros, la haute improbabilité de sa vie d'agent, tout ça, c'est de la poésie. Et comme chacun sait, Thomas Day, la poésie, ce n'est pas son truc. Lui, il fait dans le viscéral. Et en l'espèce ça fonctionne bien.
En septembre dernier je n'ai pas fait mes devoirs, et je n'ai pas lu le forcément très attendu et très polémique dernier roman de Thomas Day. Attendu, rentrée littéraire oblige, et polémique - forcément - eût égard au personnage de Thomas Day, à sa grande gueule et à son engagement tout particulier dans ce texte. L'événement s'est orchestré avec une pompe assez inhabituelle dans notre petit landernau de la SF, en partie parce que ce jeu sur l'autofiction déborde sur des thématiques qui sortent de notre petite chapelle, et aussi, ne nous voilons pas la face, parce que D(um)ay est un directeur de collection incontournable officiant dans une vénérable maison. On a beaucoup glosé, mais moi, je n'ai pas fait mes devoirs, ce qui m'a permis de partir à la découverte de La Cité des Crânes dans un climat sinon plus serein, en tout cas plus propice à se poser la seule question qui au fond importe : que reste-t-il de ce roman pour le lecteur lambda qui ignore que Thomas Day est l'avatar de plume d'un éditeur en vue et qui se contrefout de savoir si c'est, ou non, un jeu sur l'autofiction (parce que lui, le lecteur lambda, l'autofiction, la littérature blanche ou le surexistentialisme anal il s'en fout pourvu que le plaisir de la lecture soit au rendez-vous) ?
Hé bien il reste un sacré bon bouquin, bordel de dieu ! Envoûtant, moite, habité par la passion du voyage et hanté par une région du monde où l'on sent, non, on sait, une fois la dernière page lue, que son auteur a laissé une partie de lui pour en revenir changé. Irrémédiablement. Les références sont très présentes, effet voulu mais nullement dérangeant. Bien vite finalement on ne cherche plus à savoir qui de Day ou Daezzler se confie à nous et on se laisse guider vers le chœur vert de cette cathédrale d'émeraude aux dimensions d'un sous-continent. Le scepticisme face à la démarche de s'épancher tout autant dans l'écriture que dans des trous humides s'efface devant l'engagement du verbe. On sort de La Cité des Crânes retourné, des images, des sons, des sensations plein la tête. Que Thomas Day ait finalement écrit ce roman pour solder ses comptes avec son passé importe peu, que sa vague intrigue d'espionnage ne soit pas assez développée non plus, puisqu'elle ne sert que de moteur à la lecture. Ce qui compte enfin, c'est qu'au fil des pages on sente pousser cette jungle, qu'on la sue nous aussi, qu'on découvre ce monde si loin, tellement loin du nôtre. Tout le reste, la rebel attitude en carton pâte de son héros, la haute improbabilité de sa vie d'agent, tout ça, c'est de la poésie. Et comme chacun sait, Thomas Day, la poésie, ce n'est pas son truc. Lui, il fait dans le viscéral. Et en l'espèce ça fonctionne bien.
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.
- Eric
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Enfin dans notre petit landernau SF c'était tout de même assez attendu. Et même en dehors, le bouquin a eu pas mal de couverture, comme Télérama ou France Culture. Ce qui est plus que ce que peuvent généralement espérer des auteurs comme Lehman ou Mauméjean et qui sont pourtant, il faut regarder la réalité en face, meilleurs. Mais sinon oui, tu as raison, bien des gens ne connaissent même pas Day, tout comme l'immense majorité des auteurs que nous portons aux nues.
Songe que le tirage moyen d'un Priest c'est entre 6000 et 8000 exemplaires, ce qui est carrément une honte.
Songe que le tirage moyen d'un Priest c'est entre 6000 et 8000 exemplaires, ce qui est carrément une honte.
"Ueeuuggthhhg", laissa échapper Caity. Ce qui aurait pu vouloir dire n’importe quoi.
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Arf, la concentration des pouvoirs ! Enfin si on peut dire que travailler à France Culture c'est avoir du pouvoir vu les chiffres.
Enfin Télérama et France Cul c'est une belle reconnaissance. Et ça fait plaisir parce que le bouquin est vraiment bon. Son meilleur à mon avis parce c'est celui qui se rapproche le plus de ses nouvelles avec la même violence et la même urgence.
Enfin Télérama et France Cul c'est une belle reconnaissance. Et ça fait plaisir parce que le bouquin est vraiment bon. Son meilleur à mon avis parce c'est celui qui se rapproche le plus de ses nouvelles avec la même violence et la même urgence.
Jérôme
'Pour la carotte, le lapin est la parfaite incarnation du Mal.' Robert Sheckley
'Pour la carotte, le lapin est la parfaite incarnation du Mal.' Robert Sheckley