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Un mois de lecture, Anne Besson - Décembre 2016
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Un mois de lecture, Anne Besson - Décembre 2016

Katana, vol. 1 Vent Rouge, vol. 2 Dragon Noir, Jean-Luc Bizien, Folio SF :
D’abord paru aux éditions du Pré aux Clercs, ce diptyque passé trop inaperçu mérite d’être (re)découvert dans sa version poche, sous d’efficaces couvertures éclaboussées de rouge signées Camille Alquier. On plonge avec Jean-Luc Bizien dans un Moyen Âge féodal nippon, peuplé de samouraïs, de ninjas, de daimyos, seigneurs respectés ou honnis… un univers plus historique que fantastique, où la magie n’apparaît d’abord que par petites touches, tel le mystérieux vent rouge qui balaie les dernières résistances du château assiégé dans la belle scène d’ouverture. Le premier volume, mon favori, voit ensuite se constituer, au fil de rencontres qui semblent relever du hasard, un groupe de cinq compagnons aux talents complémentaires – un colosse fils de paysan, un ninja, un voleur, un samouraï trop fier. Il leur faudra parvenir, avant de l’affronter, jusqu’au monstrueux dragon noir qui terrorise le pays, en en apprenant au passage beaucoup sur eux-mêmes. On le comprend, l’histoire, suffisamment rythmée pour nous tenir en haleine, ressemble souvent de près au déroulé d’une partie de jeu de rôles, façon Bushido ou Livre des 5 Anneaux (de bonnes références !), offrant moult prétextes à beaux combats. Mais pour qui apprécie le décor et l’esprit associés au Japon médiéval, le roman est un délice, du duo principal, composé du vieux samouraï-ermite Hatanaka et d’Ichirô, le disciple très doué qu’il a élevé à l’écart du monde, aux nombreux combats justement, amoureusement chorégraphiés, qui témoignent d’une vraie connaissance de la voie du sabre… 
 
Dan Machi, la légende des Familias, de Fujino Omori, ill. Suzuhito Yasuda, trad. Marie-Saskia Raynal, Ofelbe « Light Novel » :
J’avais déjà évoqué cette collection de romans japonais illustrés, destinés à un public adolescent, à l’occasion de leurs premières parutions, il y a moins d’un an. Depuis, plusieurs nouveaux titres, dans des segments très divers de la vaste gamme du surnaturel, sont venus enrichir le catalogue et notre connaissance de ce format nouveau qu’est le « light novel » - chaque volume français contenant désormais un seul épisode complet de séries plus vastes. Parmi ces propositions récentes, j’ai apprécié Dan Machi, la légende des Familias, un récit humoristique mettant en scène des dieux et déesses, qui règnent sur des cours d’humains dans la ville d’Oratorio. Celle-ci a pour autre caractéristique d’être placée au-dessus d’un « Donjon », un labyrinthe aux nombreux niveaux souterrains, où des aventuriers, sous les couleurs de leur « famille » (de leur Dieu protecteur), affrontent jour après jour des monstres pour ramener du butin. Autrement dit, on est dans un jeu !, et Bell, notre héros, y est un novice un peu niais, uniquement motivé par sa libido, mais entravé par sa timidité, un de ces personnages amusants, maladroits et touchants dont le manga est familier. Son panthéon syncrétique fait l’intérêt du roman, où se mêlent dieux gréco-latins, nordiques ou indiens (Freya, Hestia, Ganesh), dans un grand fourre-tout irrespectueux, sexy et souvent réjouissant : les genres s’emmêlent (Héphaïstos est une femme), tandis qu’Hestia, la protectrice de Bell, est surnommée « la Lolita laitière » en raison de sa petite taille et de sa forte poitrine !
En revanche, j’ai dû arrêter ma lecture de The Irregulars at Magic HighSchool, dans la même collection : en dépit d’un thème fort séduisant (une école de magie futuriste, des bandes d’élèves en uniforme avec divers devices canalisant leurs pouvoirs, youpi), je m’y suis perdue : problème de traduction peut-être, combiné à des codes et usages ayant cours entre jeunes japonais en contexte scolaire, qui constituent l’essentiel de l’action et qui m’échappaient complètement, je n’ai en tout cas pas compris grand-chose de ce que voulait nous dire l’histoire… 
 
La Part des Ombres 1, Gabriel Katz, Scrinéo :
Premier volume d’un diptyque annoncé, le nouveau roman de Gabriel Katz repose sur un concept attirant – à la manière des cross-over familiers des comics et des séries télévisées, deux mondes médiatiques qui ne sont d’ailleurs pas étrangers à l’inspiration de Katz, l’auteur va faire se croiser des personnages issus de ses romans précédents, qui se déroulent tous, rappelons-le, dans des parties différentes du même univers : on retrouve donc Olen, un des membres du trio du Puits des mémoires, séducteur impénitent à la langue bien pendue, Le Danseur, le combattant virtuose héros de Aeternia, et la belle Kaelyn, alias La Maîtresse de Guerre ; tous alliés autour du Fantôme, le mystérieux meneur d’une résistance balbutiante des Gorans, ancienne civilisation, face à l’occupation des Traceurs, guerriers barbares des montagnes qui les ont envahis dix ans plus tôt. Comme toujours avec cet auteur, la lecture s’avère très plaisante, l’action pleine de rebondissements, les méchants (Inoran, Akhen Mekhnet) très bien campés : on passe un bon moment en compagnie de ses héros, sympathiques et familiers. La promesse du cross-over n’est cependant pas vraiment tenue : ce serait l’occasion d’en découvrir plus sur le passé et la psychologie des trois personnages récurrents, or ils sont pour l’essentiel juste « fidèles à eux-mêmes » (c’est-à-dire pas toujours très finauds…) ; ce serait l’occasion aussi de donner à ce « monde » commun davantage de cohérence, de consistance (une petite carte ?), mais non, les régions apparaissent toujours aussi autonomes, comme si elles s’ignoraient les unes les autres. Peut-être dans le prochain volume ?  
 

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