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Interview 2016 : Feldrik Rivat pour les Kerns de l'oubli
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Interview 2016 : Feldrik Rivat pour les Kerns de l'oubli

 ActuSF : Les Kerns de l’oubli, votre série fantasy parue aux éditions de l’Homme sans nom, sort en poche aux éditions J’ai Lu en ce début d’année 2016. Pouvez-vous nous parler de l’origine de cette trilogie, s’il vous plaît ? Quel a été le point de départ pour l’écrire ? 
 
Feldrik Rivat : L’aventure a commencé en 2002, et l’écriture de la trilogie s’est étalée sur douze ans. Je me suis lancé bille en tête dans un projet pharaonique, ce qui, avec le recul, était de la pure folie. J’ai fait toutes mes armes avec les Kerns ! Il m’en a coûté sept réécritures intégrales rien que pour le premier tome, sur huit ans. Pour ce qui est des origines, le tout tient en un mot, un mot qui revient souvent dans le milieu artistique : le rêve. Bâtir un monde, le faire vivre (mieux : avoir droit de vie et de mort sur celui-ci), lui donner ses propres règles, faire évoluer un cortège de personnages : le but premier de l’aventure a toujours été de me faire plaisir, de mettre en scène mes connaissances, mes envies, mes fantasmes.  
 
 
ActuSF : Vous êtes archéologue. Vous avez dû avoir une attention particulière pour construire l’univers des Kerns de l’oubli – notamment son passé ?  
 
Feldrik Rivat : L’idée était en effet de puiser dans les mondes anciens de quoi construire un univers avec sa mythologie propre, son histoire, son empilement de civilisations. En un mot, de lui donner de l’épaisseur, et de faire de ces millénaires une caisse de résonnance. Du coup, le texte fourmille de références plus ou moins cachées pointant dans toutes les directions : le but est de jouer en permanence entre le dépaysement propre à la fantasy et ce côté mythologique qui rendrait, dans le fond, cette histoire plausible. 
 
ActuSF : Sur votre site on peut lire comme résumé du livre : « Un personnage (qui) a commis une faute voilà des millénaires et se voit depuis condamné à se réincarner pour se racheter… » Il n’a pas l’air d’avoir une vie facile… Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce héros ?  
 
Feldrik Rivat : Pour sûr : on lui refuse de vivre comme un simple être humain depuis des millénaires ! Et personne ne semble être en mesure de comprendre qui il est en réalité, ou la nature de cette faute que certains lui font porter. C’est un personnage qui pourrait souffrir d’un excès de puissance, si ce n’était pas là son plus terrible fardeau… Il a entre autres pouvoirs celui de lire la mémoire des objets, de l’eau, des lieux. Par ce biais, il va remonter à travers les vestiges de civilisations disparues, jusqu’aux origines de cette fameuse faute dont il serait coupable. 
 
ActuSF : Héros maudit qui se réincarne, cela me fait penser à Moorcock et ses champions éternels : Corum, Elric… Ont-ils fait partie de vos sources d’inspirations ? Quelles ont été les autres ? 
 
Feldrik Rivat : Et quelle source ! Moorcock, mais aussi Tolkien, Eddings, Zimmer-Bradley, Zelazny, et même Herbert avec Dune ou Dan Simmons avec Hyperion : pour ce qui est des références littéraires, je vais vite piocher dans les classiques et mes souvenirs d’ado, un peu comme si je voulais retrouver les saveurs de textes qui m’ont fait voyager autrefois. Ayant un univers très visuel, je reste aussi à l’affût de ce qui se fait en bande dessinée ou au cinéma, tout en m’écartant assez vite des univers purement imaginaires pour aller puiser dans d’autres sources. Ainsi, par exemple, on peut voir du Kundun ou de L’Himalaya, l’enfance d’un chef dans les Kerns !
 
ActuSF : Les Kerns de l’oubli est un roman choral. Pourquoi avoir choisi ce mode narratif qui fait passer d’un personnage à l’autre ? Vous ne vouliez pas vous restreindre à un seul point de vue ? 
 
Feldrik Rivat : Aïe. J’avoue ici avoir joué avec le feu. Souvenez-vous, je parlais de projet pharaonique, au début de l’interview. Ce point précis en est une des causes les plus évidentes ! Ce choix est le résultat d’un tâtonnement de plusieurs années… Le but est multiple. Le premier, en effet, est de profiter à la fois d’un point de vue introspectif (et de profiter au mieux du caractère intime et des ressentis de chaque locuteur) et de conserver la possibilité de varier les points de vue (et de rejoindre par là cette grande force conférée à la narration omnisciente). Le jeu m’a permis en plus de glisser des champs/contre-champs narratifs, en commençant une scène depuis un personnage puis en la suivant depuis son interlocuteur. Autre point, cette forme narrative m’a permis de tester plusieurs manières d’écrire, chaque personnage ayant son phrasé et son vocabulaire. Et dernier élément, et non des moindres, ce système narratif est au cœur même de l’intrigue, et trouve toute sa dimension avec la révélation finale… Une fin qui viendra dévoiler à la seconde lecture un jeu de double langage permanent tout au long du récit, qui permet au lecteur de découvrir une tout autre aventure ! 
 
 
Autre point qui se révèle, et qui n’était lui pas voulu, c’est un côté « livre dont vous êtes le héros », dans le sens où le lecteur va avoir plus d’affinités avec certains personnages, s’attachant plus, de manière inconsciente, aux informations données durant leurs chapitres, et se créant ainsi un fil de lecture et de compréhension qui lui est propre. La relecture, une fois de plus, permet de voir à quel point aucun détail n’était négligé : le hasard n’a pas sa place dans le monde des Kerns ! 
 
Actusf : Pouvez-nous nous présenter le premier tome,  L’Exil ? Comment commence cette épopée de fantasy ?
 
Feldrik Rivat : L’histoire débute avec la confrontation du héros avec une malédiction qui pèse sur lui. Elle commence de manière classique : Erkan se réveille, à l’autre bout du monde, sans aucun souvenir. Il est victime d’amnésie, celle réservée à cette caste d’hommes dont la mort ne saurait être une punition. Il va alors chercher à découvrir qui il est et va non seulement plonger dans son passé, mais également dans le fil de ses vies antérieures… 
 
Actusf : Reviendrez-vous dans l’univers des Kerns de l’oubli ? Avec une autre série ou par des nouvelles, peut-être ?
 
Feldrik Rivat : C’est une des premières questions que m’a posées mon éditeur ! Alors… rien n’est jamais gravé dans le marbre, mais cette trilogie a une unité qu’il serait sans doute dommage de remettre en cause avec un texte supplémentaire. Il y a toujours matière à développer plus, creuser, plonger, se perdre dans les tréfonds d’un univers… Mais le risque de perdre l’intention de départ est trop grand. Et puis je suis partisan de laisser des parts de mystère en pâture au lecteur ! 
 
ActuSF : Après Les Kerns de l’oubli et votre roman steampunk/uchronie La 25e Heure, quels sont vos projets d’écriture en cours ? 
 
Feldrik Rivat : La 25e Heure peut se lire comme un « one shot » (cet aspect des choses est bien vécu par les lecteurs de polar), ou comme le premier tome d’un diptyque dont les lecteurs d’imaginaire attendent de pied ferme le second volet ! La pression monte (le côté steam du projet, sans doute…) car j’ai à cœur d’être à la hauteur des attentes suscitées… Avec la suite, dont le titre est Le Chrysanthème noir, l’histoire trouvera la totalité de ses tenants et aboutissants. La véritable uchronie, quant à elle, viendra dans le projet suivant, qui renverra ces deux opus à ce qu’ils sont : une préquelle avant l’heure ! Enfin, j’en parlerai certainement mieux d’ici à deux ans, quand le tout sera sur table… 
 
ActuSF : Où les lecteurs pourront-ils vous retrouver en dédicace ? 
 
Feldrik Rivat : Je participe à de nombreux salons dédiés à l’imaginaire, avec mon éditeur, ainsi qu’à de nombreuses séances. Je consacre beaucoup de temps aux dédicaces (c’est un des moteurs les plus importants de ce début de carrière), et il est possible de consulter mon agenda, essentiellement francilien, sur mon site internet : http://kerns.fr/wordpress/salons-et-dedicaces/.
 
ActuSF : Le mot de la fin. Avez-vous un coup de cœur lecture du moment à nous faire partager ?
 
Feldrik Rivat : La question piège… j’avoue sans confesse que la liste des livres que je dois lire ou qui me font envie paraît toujours démesurément plus longue que l’autre ! Et pourtant, je n’ai plus la télévision depuis vingt ans ! Un des derniers ovnis qui ont traversé mon horizon reste La Horde du Contrevent de Damasio… Je me retrouve dans cette plume affûtée qui me donne comme un point de mire. Pour le reste, si le sujet de mon projet actuel porte sur la manière de donner du temps supplémentaire à l’humanité, ce n’est pas pour rien ! Passé les milliers de pages à lire pour approfondir les aspects documentaires, et les milliers d’heures passées à écrire, il ne reste plus que le temps de dormir ! Mais j’espère pouvoir à l’avenir dégager plus de temps pour profiter de ces trésors qui ne demandent qu’à être découverts !
 

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