A l'occasion de la parution de l'intégrale de Bankgreen aux éditions du Bélial en novembre dernier, découvrez une interview de Thierry Di Rollo.
Actusf : Quelle a été l’idée à l’origine de ce roman ?
Thierry Di Rollo : L'idée m'est venue d'un seul coup, un matin, alors que je rentrais de ma sortie dans les rues de Lyon, un magazine à la main. En ouvrant ce dernier à la rubrique des critiques littéraires, je suis tombé sur une illustration représentant une espèce de gros cétacé, un léviathan - en tout cas, aux yeux du dessinateur. Le monde de Bankgreen a coulé dans ma tête à ce moment précis, tout entier, sans aucun effort. C'est d'ailleurs la seule fois que cela m'est arrivé dans ma vie d'écrivain. En toute sincérité, je ne sais toujours pas d'où est sorti l'univers de Bankgreen.
"Bankgreen parle aussi de la vie, de la mort, du temps qui est donné à chacun de ses habitants, variable selon l'ethnie à laquelle il appartient, de tout ce qui découle de cette finitude de l'existence, au bout du compte."
Actusf : De quoi l'intégrale de Bankgreen parle-t-il ?
Thierry Di Rollo : De Bankgreen, avant tout. De cette planète immense qui régit en fait tous les êtres qui la peuplent. Le monde mauve et noir les soumet ainsi à sa Raison aux côtés des Runes, les magnifiques "gardiennes" ailées bleues. Bankgreen parle aussi de la vie, de la mort, du temps qui est donné à chacun de ses habitants, variable selon l'ethnie à laquelle il appartient, de tout ce qui découle de cette finitude de l'existence, au bout du compte. De la vanité - aux deux sens du terme - de ceux qui ont la chance de posséder une prétendue conscience ; et qui n'en font pas grand-chose. Et de l'espoir, pourtant, au-delà de tout, qui détermine in fine le monde mauve et noir. Parce que Bankgreen doit se mériter.
Actusf : Mordred, votre héros, est un redoutable mercenaire. Pouvez-nous en dire quelques mots ? A-t-il des failles ?
Thierry Di Rollo : C'est un être en armure, violent, avide de mort, tranchant - dans tous les sens du terme - qui se met au service soit des Arfans, soit des Digtères, les deux peuples qui se disputent depuis toujours la propriété des mines de Bankgreen. Il a un don particulier, celui de voir la mort de ceux qui croisent son chemin. Et il leur propose souvent une fin plus douce que celle qui les attend. Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point j'ai adoré le mettre en scène. Mordred le varanier est pour moi la quintessence de l'arbitraire humain. Dans sa méchanceté et sa vision du monde, il est aussi pitoyable que fascinant. Vous savez, c'est comme un acteur qui vous dira que les rôles de salaud sont les plus jouissifs, les plus intéressants à jouer. Pour un écrivain, en tout cas moi, eh bien, c'est pareil. Des failles ? Pas au début de l'histoire, en tout cas.
Mordred le varanier est pour moi la quintessence de l'arbitraire humain.
Actusf : Mordred, c’est aussi le nom d’un célèbre personnage de l’univers arthurien. Ont-ils des liens entre eux ?
Thierry Di Rollo : Non, aucun. J'aime bien le nom, rien de plus. Et je l'ai honteusement pillé à la légende arthurienne.
Actusf : Mais en fait, ne pourrait-on pas voir Bankgreen comme le personnage principal de votre roman ?
Thierry Di Rollo : C'est tout à fait cela, oui. Bankgreen est souveraine, indivisible. Définitivement indicible ; hier aujourd'hui et demain. Et elle ne se résumera jamais à ceux qui la peuplent. Jamais. En fait, Bankgreen est ma vision personnelle de notre propre Terre et de ceux qui en font n'importe quoi. C'est-à-dire nous.
Actusf : Vous écrivez de l’imaginaire, fantasy, science-fiction et parfois du roman noir. Il y a une raison en particulier ? Est-ce un genre qui vous permet de vous exprimer plus facilement ? D’aborder des sujets en particulier ?
Thierry Di Rollo : Oui, le roman noir m'offre la possibilité de dire ce que je ressens du monde d'aujourd'hui ; d'une autre façon. J'aime aussi le côté inéluctable du genre. Il y a de la tragédie grecque dans le polar ; le destin s'y confond souvent avec la nécessité. Et je pense que nous sommes toujours pris, tiraillés entre ces deux pôles.
"A tout prendre, je préfère la Fantasy, parce que la liberté de créer y est absolue."
Actusf : Fantasy, science-fiction, vous écrivez les deux. Préférez-vous un genre à l’autre ? Les contraintes sont-elles les mêmes ?
Thierry Di Rollo : A tout prendre, je préfère la Fantasy, parce que la liberté de créer y est absolue. Bankgreen a été un plaisir d'écriture total, de ce point de vue là, et que je n'ai jamais retrouvé avec cette intensité dans mes autres romans. J'espère que les lecteurs le ressentiront tout au long de leur voyage dans ce livre-univers, le vivront pleinement.
Actusf : Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Thierry Di Rollo : Rien de précis. Bankgreen a été une exception : toutes mes histoires sont difficiles à accoucher. Très.
Actusf : Où peut-on vous rencontrer dans les mois à venir ?
Thierry Di Rollo : Les dates potentielles ne sont pas encore vraiment arrêtées.
Actusf : Et une dernière question. Noël approche. Y-a-t-il des romans que vous aimeriez trouver sous le sapin ?
Thierry Di Rollo : Pas de roman, non, mais des livres sur le monde romain de l'antiquité, par exemple. Rome m'a toujours fasciné. Par sa folie, sa démesure, son arbitraire, ses quelques traits de génie. Par tout ce que nous sommes, en fait, depuis les débuts de ce que nous appelons "l'humanité".