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Interview de K.W.Jeter sur Dr.Adder
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Interview de K.W.Jeter sur Dr.Adder

En 2020, Actusf a 20 ans ! On en profite pour tout au long de l'année vous proposer de relire, écouter ou revoir nos plus belles archives. Aujourd'hui, une interview de K.W. Jeter, à l'occasion de la réédition de Dr Adder au moment de sa venue aux Utopiales en 2014.
 
René-Marc Dolhen : Dr Adder a été écrit en 1973 et publié seulement en 1984, malgré le soutien de Philip K. Dick. Le roman publié est-il identique à celui écrit en 1973 ou avez-vous dû le remanier en profondeur ?
K.W. Jeter : Le roman publié est exactement celui que j’ai écrit en 1973.
 
René-Marc Dolhen : Dr Adder est intemporel. La montée de l’intégrisme religieux et de la violence aux USA (du moins ce qu’on en perçoit depuis l’Europe) rend ce roman plus actuel que jamais. était-ce votre but en écrivant Dr Adder ?
K.W. Jeter : Je ne suis absolument pas au courant d’une progression des mouvements religieux aux États-Unis ; au contraire, pour le meilleur ou pour le pire, la société américaine est bien plus séculière aujourd’hui qu’au temps de l’écriture du roman. À l’époque, jeune homme, j’ai essayé de faire une description satirique de la société, mais en vieillissant il me semble que cela a surtout à voir avec la vie intime de l’auteur. Je crois qu’il faut souvent avoir une certaine distance avec une production écrite avant de pouvoir la saisir clairement, ou moins nébuleusement.
 
René-Marc Dolhen : Dr Adder, publié juste avant Neuromancien de Gibson, a souvent été perçu comme un roman cyberpunk. Qu’en pensez-vous ? Comment voyiez-vous ce mouvement à l’époque ? Pensez-vous que vous lui étiez lié ?
K.W. Jeter : Dr Adder n’est pas cyberpunk, aucun de mes écrits ne l’est, d’ailleurs. Je n’ai pas d’avis sur le cyberpunk, ni dans un sens ni dans l’autre ; je pense juste que cela n’a rien à voir avec moi. Je crois avoir perçu correctement le cyberpunk à l’époque en le voyant plus comme un truc marketing plutôt qu’un vrai mouvement littéraire. Certains ont essayé de m’y associer pour en faire un tournant plus vaste qu’il ne l’était. Mais à mon sens, ils se sont trompés.
 
René-Marc Dolhen : Beaucoup de vos livres sont situés à Los Angeles. Vous êtes perçu comme l’écrivain californien typique. Et pourtant depuis quelques années vous vivez en équateur. Qu’est-ce qui vous a conduit à ce changement radical ?
K.W. Jeter : J’ai toujours été un écrivain de Los Angeles, c’est mon paysage intérieur. Mais mon esprit est le seul endroit où ce Los Angeles existe encore ; quand j’y retourne je ne le reconnais plus. L’Équateur est un très beau pays peuplé de gens merveilleux, et c’est une belle aventure d’y vivre ; mais je ne sais pas combien de temps je vais y rester. Ma femme et moi aimons voyager et déménager.
 
Si j’en avais marre de l’american way of life, je serais plutôt malchanceux car il est devenu omniprésent, vous le trouvez partout maintenant.
 
Dr Adder, K.W.Jeter
 
René-Marc Dolhen : A notre connaissance, vous n’avez écrit aucun texte se déroulant en équateur. Ce pays va-t-il inspirer vos futurs travaux ?
K.W. Jeter : C’est déjà le cas. Mon thriller Kim Oh 5: Real Dangerous Fun se déroule dans une version fictionnelle de l’Équateur.
 
René-Marc Dolhen : Une partie de vos derniers romans (la série « Kim Oh ») a été publiée directement en ebooks sur Amazon. Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?
K.W. Jeter : Très satisfaisant. à mon avis c’est le futur. C’est un processus bien plus rapide que l’édition traditionnelle, avec une connexion plus immédiate entre un écrivain et son public. L’écrivain doit prendre une plus grande responsabilité dans la production de ses livres ; certains n’aiment pas ça, mais moi je préfère. C’est un peu comme le rock’n’roll : si c’est plus brut, ça peut produire plus d’excitation.
 
René-Marc Dolhen : Votre œuvre a toujours eu deux faces : une fun (avec les romans steampunk et « Kim Oh ») et une sombre, de Dr Adder jusqu’à Noir. écrivez-vous toujours des deux côtés ou la face sombre est-elle définitivement terminée ?
K.W. Jeter : J’explore toujours les deux faces. Les livres que je vais faire publier dans un futur proche seront plus sombres.
 
Propos recueillis par René-Marc Dolhen
 
 
Bonus : Une courte interview aux Utopiales 2014 avec pour la traduction l'aide de Sylvie Miller.
 
 

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