S’il existe un univers dans lequel l'esthétique vaporiste s'épanouit c’est bien la Bande Dessinée et ce depuis le début. Alors que le terme Steampunk n’avait pas encore été inventé, Tardi et son Démon des glaces (1974) rendait déjà hommage à Jules Verne avec un récit rétrofuturiste et ses machines incroyables. La BD suivra dès lors l’évolution du genre, s’inspirant d’abord de la littérature puis ensuite de la communauté (j’évoquerai sur ce point les comics et en particulier la naissance de Lady Mechanika dans un autre article, promis).
C’est surtout la liberté graphique proposée par ce médium qui permet toutes les folies et toutes les extravagances en terme graphiques et scénaristiques.
La Ligue des Gentlemen Extraordinaires. Moore, O’Neil. Editions USA (4 tomes).
Ok, je vous parle de BD et je commence par un comics mais impossible de ne pas évoquer dès maintenant ce chef d’oeuvre ! Imaginez une bande de super-héros littéraires : Allan Quatermain, Dr Jekyl (et Mr Hyde), l’Homme invisible, Mina Harker, dans le Nautilus du Capitaine Nemo, engagés pour sauver la Couronne Britannique d’une invasion extraterrestre ! Le tour de force de Moore est d’avoir distillé tout au long des pages de multiples références à la littérature et à la culture populaire. Chaque personnages rencontrés, faits évoqués ou lieu visité est une de ces références. Voilà ce qui rend cette BD intemporelle. Elle se nourrit de vos lectures et de votre culture pour continuellement se renouveler. Tout ça souligné par le style inimitable de Kevin O’Neil. Un chef d’oeuvre je vous dit !
Hauteville House, Duval, Gioux. Delcourt (17 volumes à ce jour)
Avec 17 volumes publiés à ce jour, Hauteville house est la plus grande saga steampunk BD française. En plein Second Empire, Victor Hugo lève une armée clandestine pour lutter contre Napoléon III. Dans la première aventure, c’est l’agent Gavroche qui doit rejoindre le Mexique pour enquêter sur une arme inconnue que convoite l’Empereur.
Hauteville House mélange espionnage, aventures extraordinaires et machines anachroniques. Bien que les premiers tomes soient un peu brouillon, c’est sur le long terme que la série se savoure grâce à une lecture plaisante par les multiples rebondissements et trahisons (et la technologie tellement rétrofuturiste !)
Les Sentinelles. Dorison, Breccia. Delcourt (4 tomes)
Le programme Sentinelles vise à créer des militaires mi-hommes mi-machines. Malheureusement, les batteries de ces robocops ont la fâcheuse tendance à tomber en rade au beau milieu des champs de batailles du Maroc en 1911. Trois ans plus tard, un chercheur, Gabriel Ferraud, invente la pile au radium, énergie presque inépuisable. Malgré les propositions plus qu’ insistantes de la part du haut commandement français, Ferraud, farouchement anti-militariste, refuse de leur laisser sa découverte. En réponse, il est mobilisé et en août 14, fauché par un obus. Réanimé mais amputé de tous ses membres, l’Armée lui propose un marché : en échange de la vie, Ferraud donne sa découverte et accepte de devenir Taillefer, le nouveau Sentinelle.
Série malheureusement abandonnée, les Sentinelles est du grand Dorison. Fresque anti-militariste entrecoupée d’images d’époque, on y découvre la naissance du premier super-héros à la française et ça sent bon le Iron Man et le Captain America du début du siècle dernier. Elle montre également que le Steampunk naît au 19ème siècle mais meurt dans la boue des tranchées quand l’homme découvre que la science peut le mener à sa perte. Une adaptation ciné était prévue mais la malchance semble s’être de nouveau abattue sur Taillefer et les autres. Je croise les doigts.
Pour aller plus loin : Il existe pléthore de Bandes Dessinées explorant l’esthétique et les thématiques Steampunk. Allez jeter un oeil (voir deux) aux Spectaculaires de Hautière et Poitevin ou les aventures rocambolesques de quatre artistes de cirque qui se prennent pour des super-héros, aux Fantômes de Neptune de Valp ou quand des exoarchéologues découvrent en 1890 des traces d’une civilisation qui a colonisé le système solaire et au réseau Bombyce ou les péripéties deux monte-en-l’air dans un Bordeaux retrofuturiste.
