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Trois raisons de lire (et regarder) Last Man
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Trois raisons de lire (et regarder) Last Man

Il y a bien des chances que vous connaissiez déjà Last Man, mais comme c'est considéré comme un classique génial à la croisée des mondes de la BD et du manga, on va répéter pour ceux du fond !

En mars 2013 sort chez Casterman le premier tome de cette bande-dessinée française, scénarisée par Balak et Bastien Vivès, que ce dernier a aussi dessinée avec Michaël Sanlaville. Ces trois-là sont de joyeux lurons : Michaël Sanlaville a travaillé chez Xilam et avec le magazine Fluide Glacial ; Balak, lui, travaille sur Les Kassos, la célèbre mini-série animée trash de l'assistante sociale qu'il faut aller voir quand dans vos vies ça va mal, ou bien la websérie Peepoodo qui est encore un cran au dessus ; enfin Bastien Vivès, c'est Le Goût du chlore, prix de la Révélation du FIBD 2009, c'est Polina, Une sœur, ou Le Chemisier, des titres acclamés par les critiques. Les trois créateurs se connaissent depuis longtemps, tous trois ont fait l'école des Gobelins, et ont déjà travaillé ensemble.

Last Man c'est un projet commun. Au départ, ils voulaient en faire une BD pornographique (et on en retrouvera des éléments dans Last Man, dans le graphisme, le design, dans l'humour, etc), mais finalement c'est vers LA série d'aventure qu'ils ont toujours rêvé de faire qu'ils se tournent. Ils s'inspirent de tout ce qu'ils ont aimé étant petits, et c'est parti !


L'explosion des frontières

Last Man commence dans un royaume d’allure médiévale, où vivent un petit garçon, Adrian, et sa mère, Marianne. Adrian s’entraîne avec son coéquipier pour participer au grand tournoi et remporter la coupe des rois ! Puis survient le problème : son équipier est malade et si personne ne le remplace, Adrian sera obligé de déclarer forfait. Ses rêves s’écroulent … jusqu’à l’arrivée de cet homme inconnu, le dernier participant à s’inscrire (un poil en retard) au tournoi : the last man, Richard Aldana. Marianne se méfie, on comprend pourquoi : cet homme détonne, pantalon et veste noirs, gants de protection, un « gars » dans un monde de chevaliers. Ses techniques sont inconnues, pas dans les règles. Il n’est pas d’ici. Mais il est fort et il est … charmant.

Et voilà on a déjà tous les éléments de Last Man : Richard Aldana, qui n'est jamais à sa place dans ces deux mondes et ces deux époques, un duo surprenant qui devient immédiatement attachant, un tournoi qui évoque évidemment celui du manga Dragon Ball Z, des influences fantasy et d’autres SF, qu’on découvre plus tard, dans un désert à la Mad Max, et des villes dépravées aux technologies futuristes, inspirées de la SF des années 80. Les codes des genres sont tous repris pour être poussés plus loin, explosés, détournés, tout est utilisé avec brio, y compris la caricature, qu'on sait assez spontanée chez le dessinateur.

Le style graphique évoque de tout ! Toujours aux frontières entre manga et BD, certains personnages sont magnifiques, et d'autres ... caricaturalement super moches ! Et des personnages moches dans une ville moche à la société moche, qu'est-ce que ça fait du bien. On se marre bien, que ce soit grâce à des répliques potaches ou de l'humour noir, ça envoie.

Des héros abîmés mais incarnés

Dans ces univers très différents les personnages ont toujours quelque chose à découvrir, et quelque chose leur tombe toujours dessus ! L’intrigue est dynamique, mais prend le temps d’explorer ses personnages, de les rendre profonds, d’exposer leurs blessures, leurs sentiments et leurs motivations (en temps et en heure, car au début leur passé est bien mystérieux) et de les surprendre, eux et les lecteurs par des plot twists incroyables. On ne s’ennuie jamais, tout est aussi rythmé qu’un combat de boxe, surtout les combats d’ailleurs !

On suit notre duo et leurs amis évoluer au fil de leur quête : l’élément de départ les mènera bien plus loin qu’on ne peut le penser. C’est aussi ça la force de cette histoire, la montée crescendo de son intensité et de ses thèmes.

Richard, le mec normal, entraîné dans des événements qui le dépassent, qui enchaîne les erreurs qui finissent toujours par le rattraper : le looser proche du anti-héros, du moins s’il ne savait pas si bien envoyer ses crochets du droit.

Marianne, la mère aimante qui se révèle bien plus que ça, comme la plupart des personnages féminins de la série d'ailleurs. Que ce soit Tomie, Marianne ou Elorna, leurs personnages vont plus loin que leur belle plastique. Leurs forces physique ou de caractère, leurs valeurs morales et leurs actes en font de valeureux modèles et des figures dans lesquelles on peut facilement se projeter, on aime avec Marianne, on est en colère avec Tomie, et on grandit avec Elorna.

Vous le verres, les trois créateurs de la série ne reculent devant rien pour traumatiser leurs protagonistes, et donc leurs lecteurs ! Les foules se sont soulevées à la mort de certains personnages. Enfin bon, au moins les méchants ne sont pas épargnés non plus par l'imprévu et le karma !

"-Et vous Marianne, êtes-vous affiliée à un club de boxe?
-Heu... Non, je suis boulangère!
-Boulangère, mouiiii! Apparemment vous avez un don pour distribuer des pains!"

Une histoire multi-format

Mais Last Man ce n’est pas juste une série en bande-dessinée. Volontairement ou parce que le scénario n’a pas permis de les expliciter, la saga a des zones d’ombres, des pistes laissées à d’autres supports : en 2016 un série d’animation raconte la genèse du personnage principal, Richard, diffusée sur France 4, et maintenant disponible sur Netflix.

Révérée au niveau de l’animation, cette série animée permet de mieux comprendre une part de l’intrigue, qui n’est pas explicite sur papier, bien que cela n’entrave en rien l’attachement global à la BD, et elle peut tout à fait se suffire à elle-même.

Le hors-série Last Man Stories prolonge l'univers, en proposant l'histoire de H, et de sa rencontre avec Richard.

Et puis il y a aussi un jeu vidéo de combat ! Comment résister quand les héros participent à des tournois à avoir envie de jouer à une version en jeu-vidéo ? C'est donc pour satisfaire cette envie qu'est sorti en 2016 le jeu vidéo LastFight, disponible sur Switch depuis 2019.

 

Pour résumer, Last Man, c'est génial, on s'amuse, on rigole, on vibre. C'est finalement un petit garçon qui apprend que le monde est cruel, et violent, pas toujours beau, mais qui rencontrera des gens sur qui compter, et qui compteront, qui remplaceront des vides de sa vie. C'est aussi l'histoire d'un combattant, à qui il arrive toujours des emmerdes, et qui ne renonce jamais à s'en sortir, pour le meilleur ou pour le pire, avec quelques dommages collatéraux.

Une histoire émouvante donc, mais drôle aussi et une fois dedans c'est compliqué de ne pas foncer sur le tome suivant. Normal pour une BD consacrée au Festival d'Angoulême en 2015 !

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