On la surnomme Méduse depuis si longtemps qu’elle en a oublié son véritable prénom. Elle marche tête baissée, le visage caché derrière ses cheveux, pour épargner aux autres la vue de ses Difformités. Elle-même n’a jamais osé se regarder dans un miroir.
Placée dans un institut pour jeunes filles à la merci d’adultes peu scrupuleux, Méduse n’a de cesse d’accéder à la bibliothèque des lieux, seul moyen pour elle de s’ouvrir à la connaissance du monde. À force de ruse et de prise de conscience des pouvoirs de ses globes oculaires, qu’elle se garde longtemps de dévoiler, elle nous entraîne dans sa croisade contre l’oppression et la honte du corps.
Roman d’apprentissage, roman gothique féministe, conte cruel ? Méduse est tout ça à la fois, et surtout un ouvrage tellement finement brodé littérairement qu’on ne peut en manquer un mot ni un propos : Martine Desjardins, tout autant que Méduse, nous prend dans ses filaments.
Récemment publié aux éditions de l'Atalante, (re)découvrez Méduse de Martine Desjardins.
Surnommée Méduse, cela fait bien longtemps qu'elle a oublié son véritable prénom. Elle cache ses yeux maudits derrière ses cheveux, baisse la tête et rase les murs pour faire oublier son existence. Elle ne s'est jamais regardé dans un miroir, par peur, par honte de découvrir la vérité...
À vrai dire on ne se douterait jamais que les méduses sont venimeuses. Tu vois, même la beauté la plus fragile peut être monstrueuse.
Ovni littéraire, ouvrage court et atypique, on aime ou on n'aime pas, mais ce livre a quelque chose ! Sorte de réécriture du mythe antique de Méduse, on découvre une jeune femme affublée de deux "Monstruosités" qui gagnent en puissance jusqu'à pouvoir tuer, telle la célèbre Gorgone. Méduse a honte de ses yeux, de ses "Difformités". Elle ne les a jamais vues et pourtant, sa vie sera dictée par ses "Immondices" qu'elle doit cacher.
Oscillant entre fantastique horrifique et récit poétique, l'autrice démontre d'un vrai talent pour plonger ses lecteurices dans une atmosphère gothique et sombre à l'aide d'un vocabulaire opulent.
Un jour, j’irai moi aussi rejoindre les méduses. Mais, entre-temps, la vie m’appelle et je verrai bien où me portera son courant. Je ne regarderai pas en arrière. Je n’aurai de pensée ni pour toi ni pour personne. Je ne verserai aucune larme. J’ai un cœur de pierre.
Convoquée ici, la figure de Méduse sert également à dénoncer la honte du corps des femmes, l'avilissement des femmes par les hommes, le regarde de la société sur la différence et bien d'autres choses. Une lecture à double niveau, qui surprend et qui dérange.
Une lecture singulière.