Jean-Philippe Jaworski : Le jeu de rôle

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Tybalt a écrit:

Le fait d'avoir élaboré des univers et des scénarios vos a-t-il aidé dans l'écriture du roman (et peut-être des nouvelles, mais je pensais plutôt au travail d'élaboration narrative et de gestion d'un grand nombre d'intrigues en cours et de personnages auquel donne lieu l'écriture d'un roman comme Gagner la guerre) ?


Oui, je pense que cela m'a aidé.
En particulier parce que la composition d'univers de jeu et de scénarios force à penser en arborescence, pour prévoir toutes les interactions entre PNJ, partis, factions, et les intrigues qui en découlent. Cela permet de complexifier les sociétés du monde fictif, et de nuancer les personnages qui se trouvent souvent saisis dans des réseaux ou des schémas conflictuels.
On peut très bien penser ainsi sans faire de jeu de rôle, mais l'habitude de construire des scénarios donne une certaine tournure dramaturgique et aide à accoucher d'une coterie comme celle du Podestat, par exemple, dont les conflits entrelacés sont à la fois d'ordre politique, artistique, familial, privé et public.

En outre, être maître de jeu aide beaucoup à gérer le point de vue narratif, car je fais très attention à me mettre à la place des personnages joueurs pour leur décrire uniquement ce qu'ils sont en mesure de percevoir. Du coup, cela me permet de conserver une dimension ludique dans l'écriture romanesque, puisque j'expose parfois sans appuyer, comme dans une partie, ce qui fait que le lecteur peut avoir sous les yeux un élément dont il ne soupçonne pas l'importance. (Comme certain dentier, par exemple…)

Enfin, dans Janua Vera, parmi les archétypes détournés, il y en a qui sont également ludiques (le barbare, le prêtre, l'assassin, le paladin, sans oublier le changeur de forme…)

Tybalt a écrit:

Le fait d'avoir d'abord conçu le Vieux Royaume comme un univers de jeu de rôle vous a-t-il aidé (en fournissant une "base de données" toute prête, par exemple), et en quoi vous a-t-il au contraire gêné, ou obligé à prendre de la distance par rapport à ce que vous aviez conçu au départ ?


L'univers de jeu du Vieux Royaume est bien sûr fondateur de l'univers romanesque, bien qu'il y ait des différences entre les deux cadres. La géographie, l'histoire (à quelques adaptations près), les régimes politiques, le système religieux, quantité de personnages sont identiques.

En revanche (et contrairement à ce que j'ai parfois pu lire sur le net), j'ai pris une grande distance avec le système de jeu. La magie de l'univers romanesque, en particulier, n'a rien à voir avec la pyrotechnie donjonnesque de l'univers de jeu. Certaines plaisanteries de MJ pas très fin (comme les calembours des noms ciudaliens) se sont transformés en une sorte de contrainte poétique (d'un esprit toujours très douteux, d'ailleurs) dans l'univers romanesque.
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